Le rôle du commerce international dans les Grandes Découvertes

Le rôle du commerce international dans les Grandes Découvertes

Au seuil du 15ème siècle, l'Europe entreprend des explorations maritimes sans précédent, marquant le début de ce qu'on appellera "Les Grandes Découvertes". Bien que le commerce maritime ait une bien plus longue histoire, on peut penser par exemple aux marchands phéniciens durant l’Antiquité ou plus proche de cette époque à l'amiral chinois Zheng He au 14ème siècle, c'est néanmoins à cette époque que les européens se lancent vers des terres lointaines comme jamais auparavant.

Au cours du moyen-âge, les Républiques italiennes dominent les routes commerciales de la Méditerranée vers l'Asie. Venise, Gênes et Pise facilitent les échanges vers le Proche-Orient, une étape cruciale des "Routes de la soie" établies depuis le 2ème siècle avant J-.C..

Impliqués dans le commerce d'une variété de marchandises, tels que les épices, la soie, les textiles et les métaux précieux d'Asie, les marchands italiens jouent un rôle déterminant dans le commerce international en tant qu'intermédiaires, facilitant le flux des marchandises et contribuant à la prospérité de leurs sociétés.

Dotés de ports stratégiquement situés et de vastes réseaux commerciaux, les Républiques italiennes ont en effet établi des colonies et des comptoirs le long des côtes de la Méditerranée orientale et du Proche-Orient. Leur expertise dans ces routes maritimes était déjà bien établie pendant les Croisades, où elles fournissaient des ravitaillements aux croisés occidentaux lors de certains sièges.

Deux événements majeurs, indépendants de leur volonté, vont cependant perturber l'ordre du commerce mondial alors en vigueur et redessiner la géopolitique globale pour les siècles à venir.

D'une part, l'émergence de deux futurs grands empires à l'extrême ouest de l'Europe : l'Espagne et le Portugal. Ces royaumes, ayant achevé la Reconquista sur la péninsule ibérique à la fin du 15ème siècle, poursuivent leur expansion vers le sud en tentant de conquérir l'Afrique du nord. Surtout, le Portugal a déjà entamé son exploration de l'océan Atlantique à la recherche de nouvelles terres notamment pour développer sa puissance commerciale.

D'autre part, la chute de Constantinople face aux Ottomans en 1453 aura aussi un impact déterminant dans le déplacement du centre de gravité du commerce mondial depuis le bassin méditerranéen vers l'océan Atlantique.

Constantinople, aujourd'hui Istanbul, est à cette époque un hub commercial majeur pour les échanges entre l'Europe et l'Asie permettant aux marchands européens d'accéder aux marchandises de grande valeur asiatiques de cette époque comme les épices et la soie.

Face à leur relative marginalisation géographique à l'extrême ouest de l'Europe puis à la prise de Constantinople, stratégiquement située sur les routes commerciales terrestres menant vers l’Asie, l'Espagne et le Portugal sont contraintes d'explorer de nouvelles routes maritimes.

Deux options se présentent à elles : trouver une route qui leur permet de contourner l'Afrique, en particulier les royaumes musulmans qu’ils combattent au nord, ou rejoindre l'Asie par l'ouest en traversant l'immense océan Atlantique, ce qui constitue un défi considérable.

Bien que l'on apprendra bien plus tard que les Vikings auront déjà atteint l'Amérique du Nord cinq siècles auparavant en partant du Groenland conquis, la traversée de l'Atlantique n'en reste pas moins une entreprise très risquée à l’aube du 16ème siècle.

L'Espagne et le Portugal se lancent ainsi dans des expéditions maritimes ambitieuses, animées par le désir de découvrir de nouvelles routes vers le lucratif commerce avec l’Asie.

L'effort Portugais aboutit en 1488 en contournant la pointe sud du continent Africain puis en parvenant à atteindre l’Inde, disputant ainsi le monopole commercial des royaumes arabes dans l’océan Indien. La route maritime créée sera plus tard empruntée par les hollandais, anglais et français qui tentent de rattraper leur retard sur les puissances ibériques en fondant de nombreux comptoirs, des forts puis des colonies au cours des siècles suivants sur les côtes africaines et asiatiques.

Du côté Espagnol, la recherche de nouveaux débouchés commerciaux aboutit en 1492 à la découverte inattendue de l'Amérique par Christophe Colomb, qu'il croit être les Indes orientales. Sans le savoir, il permet ainsi aux européens d'accéder à un immense nouveau continent qui sera exploré puis exploité par les Conquistadors dans un premier temps.

Dans un contexte de compétition intense pour le contrôle du lucratif commerce des épices, le Traité de Tordesillas, signé en 1494 par le Pape, ainsi que les souverains espagnols et portugais, cherche à établir des revendications territoriales claires et éviter une guerre directe. Ce traité divise le monde en deux monopoles commerciaux, attribués à chacun des deux empires.

Plutôt que de résoudre les conflits, le Traité de Tordesillas donne indirectement naissance à de nouvelles expéditions, telles que celle de Magellan en 1519 au service de la Couronne d'Espagne. L'objectif initial de cette entreprise était de prouver que les îles Moluques se trouvaient à l'est de l'antiméridien défini par le Traité, les plaçant ainsi sous la souveraineté espagnole. Cette expédition se solde surtout par le premier tour du monde réalisé par circumnavigation, achevé à leur retour en Espagne en 1522.

Par ailleurs, le Traité suscitera le ressentiment d'autres puissances européennes montantes, qui n'hésitent pas à recourir à la piraterie afin d’accéder aux richesses du Nouveau Monde en contournant ces monopoles commerciaux, notamment dans les mers des Caraïbes.

L’une des figures les plus célèbres de cette époque, le corsaire britannique Francis Drake, se distinguera ainsi au cours du 16ème siècle en pillant les navires ennemis espagnols chargés de l'or et de l'argent des mines d’Amérique du sud, avant de devenir vice-amiral de la Royal Navy.

Les richesses apportées par Francis Drake permettront non seulement au Royaume d'Angleterre de rembourser sa dette extérieure mais aussi à la Reine Elisabeth Ier de financer une nouvelle flotte maritime, mieux équipée et plus rapide. Celle-ci annoncera l'émergence de la puissance navale anglaise qui, quelques siècles plus tard, sera le fer de lance lui permettant de créer le plus vaste empire de l'Histoire.

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